François d'assise
Né à Assise François vit d'abord une jeunesse folle. Participant à la guerre entre Assise et Pérouse, il est fait prisonnier. Plus tard, parti pour une autre guerre, il entend une voix lui dire: "Pourquoi sers-tu le serviteur et non le maître?" C'est pour lui le début d'une nouvelle existence.
Rentré à Assise, il se tourne vers les pauvres et les lépreux. Il a 24 ans. Dans la chapelle de Saint Damien, il entend le grand crucifix lui dire: "Répare ma maison qui, tu le vois, tombe en ruines." Le voilà transformé en maçon. Pour réparer la chapelle, il dépense l'argent de son père qui l'assigne devant l'évêque. Il se dépouille alors de tous ses vêtements en déclarant qu'il n'a d'autre père que celui qui est aux cieux.
Un matin, il entend l'évangile de l'envoi en mission des disciples. Appliquant l'Évangile à la lettre, il parcourt la campagne, pieds nus et une corde pour ceinture, en annonçant: "Que le Seigneur vous donne sa paix." Des compagnons lui viennent et il leur rédige une Règle faite de passages d'Évangile. Quand ils seront douze, ils iront à Rome la faire approuver par le Pape.
Pour les laïcs, il fonde un troisième Ordre, appelé aujourd'hui "la Fraternité séculière." Il envoie ses frères de par le monde et lui-même rencontre le sultan à Damiette pour faire cesser la guerre entre chrétiens et musulmans. A son retour, il trouve l'Ordre en grandes difficultés d'unité. Il rédige une nouvelle Règle et se retire, épuisé, sur le mont Alverne où il reçoit les stigmates du Christ en croix. Il connaît ainsi dans son cœur l'infini de l'amour du Christ donnant sa vie pour les hommes. En 1226, au milieu de très grandes souffrances, il compose son "Cantique des Créatures" et le 3 octobre, "nu, sur la terre nue", il accueille "notre sœur la mort corporelle."
Ce cantique a été composé par François d’Assise deux ans avant sa mort et achevé par frère Pacifique.
Saint François d'Assise amoureux de la nature, est devenu le patron de l'écologie en 1979. Il inspire aussi les non-violents.
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Très haut tout-puissant, bon Seigneur,
à toi sont les louanges, la gloire et l’honneur, et toute bénédiction.
À toi seul, Très-haut, ils conviennent
Et nul homme n’est digne de te mentionner.
Loué sois-tu, mon Seigneur, avec toutes tes créatures,
spécialement, monsieur frère Soleil,
lequel est le jour, et par lui tu nous illumines.
et il est beau et rayonnant avec grande splendeur,
de toi, Très-Haut, il porte la signification.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par sœur Lune et les étoiles,
dans le ciel tu les as formées, claires, précieuses et belles.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par frère Vent,
et par l’air et le nuage et le ciel serein et tout temps,
par lesquels à tes créatures tu donnes soutien.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par sœur Eau,
laquelle est très utile et humble, et précieuse et chaste.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par frère feu
par lequel tu illumines dans la nuit,
et il est beau et joyeux et robuste et fort.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par sœur notre mère Terre,
laquelle nous soutient et nous gouverne,
et produit divers fruits avec les fleurs colorées et l’herbe.
Loué sois-tu, mon Seigneur,
par ceux qui pardonnent pour ton amour
et supportent maladies et tribulations.
Heureux ceux qui les supporteront en paix,
car par toi, Très-Haut, ils seront couronnés.
Loué sois-tu, mon Seigneur, par sœur notre mort corporelle,
à laquelle nul homme vivant ne peut échapper.
Malheur à ceux qui mourront dans les péchés mortels.
Heureux ceux qu’elle trouvera dans tes très saintes volontés,
car la seconde mort ne leur fera pas mal.
Louez et bénissez mon Seigneur,
et rendez-lui grâce et servez-le avec grande humilité.
François n’était ni un intellectuel, ni un guérisseur : d’où viennent donc son charisme et sa popularité ?
Oui, c’est surprenant. Son jeune disciple, Antonio di Padova, dépasse son fondateur par ses miracles et ses guérisons et même par sa popularité. La popularité de François est due à des motifs plus complexes. C’est sa personne tout entière et son action qui font de lui une des réalisations humaines les plus accomplies et les plus fascinantes, d’après ce que disent les psychologues. A son compagnon Frère Masseo qui lui demandait : « Pourquoi tout le monde court-il après toi ? », François a répondu un jour : « Parce que Dieu n’a pas trouvé sur terre de pécheur plus vil que moi ». Il était sincère mais il ne disait pas la vérité ! En réalité, le monde entier, plus de huit siècles après, court encore derrière François parce qu’il voit réalisées en lui ces valeurs auxquelles croyants et non croyants aspirent tous secrètement : la joie, la paix et la fraternité.
Qu’est-ce qui l’a poussé à vivre l’Évangile de façon aussi radicale ?
Revenons au thème du « secret » de François. Ce qui l’a poussé à une suite aussi radicale de l’Évangile était son amour radical pour l’auteur de l’Évangile. La radicalité est la marque des saints. Ils vont jusqu’au bout, ils ne conçoivent même pas que l’on puisse s’arrêter à un objectif intermédiaire. Chez François, la radicalité a aussi un motif historique : la constatation de ce qu’il était facile de diluer l’Évangile avec ce qu’il nommait les « gloses », c’est-à-dire les interprétations légalistes. D’où son cri parfois, violent : « Sans glose ! Sans glose ! », c’est-à-dire sans aucun « distinguo ».
D’où lui venait sa capacité à aimer la souffrance et à embrasser les pécheurs ?
François le dit clairement dans son testament : « Le Seigneur lui-même m’a conduit parmi eux ». C’était son amour de Jésus qui le poussait à aller vers les membres les plus blessés de son corps. Il y a des personnes qui, à partir de leur amour des pauvres, sont arrivés à l’amour du Christ (Simone Weil, par exemple) ; il y en a d’autres qui sont partis de l’amour de Jésus pour arriver à l’amour des pauvres. François appartient à ces derniers.
Récemment, certains ont étiqueté François comme le « premier écologiste de l’histoire » : mais cela n’est-il pas une définition anachronique ?
En effet, François a fait et prêché ce que l’on appelle aujourd’hui l’écologie, mais la raison de sa sensibilité écologique était différente de celle d’aujourd’hui. François voyait dans la création l’œuvre et le reflet de Dieu. Il avait à l’égard de la création une attitude doxologique, et non sociologique, c’est-à-dire de contemplation et de glorification, non utilitariste. Pour lui, comme pour la Bible, les cieux et la terre étaient pleins de la gloire de Dieu et il éprouvait le besoin de chanter cette louange. Récupérer quelque chose de ce comportement religieux serait extrêmement bénéfique à l’écologie moderne qui, sinon, en vient à perdre une des motivations les plus fortes vis-à-vis de la nature. Personne n’a joui des créatures (frère soleil, sœur lune, mère terre, sœur eau) plus que lui qui ne désirait en posséder aucune.